La lumière a jailli

Adolescente, Rossetti Lau était bien déterminée à trouver des réponses aux questions que lui posait la vie peu importe le temps nécessaire pour y arriver. Les réponses sont venues...et avec elles, des découvertes inattendues passionnantes! Rossetti, aujourd'hui religieuse dans notre Institut, lève le voile sur son mystérieux passage du bouddhisme à la foi chrétienne et à la vie missionnaire.

Bonjour, Rosetti. J’aimerais  que tu  te  présentes et que tu nous parles de ton enfance. Je suis née et j’ai grandi à Hong Kong. Mes parents venaient de Chiu Chow, un petit village du sud de la Chine; ni l’un ni l’autre n’étaient catholiques. Ils étaient très attachés aux valeurs chinoises traditionnelles : ardeur au travail, primauté des garçons sur les filles, fidélité à la famille, etc. cadette d’une famille de 7 enfants (5 filles, 2 garçons), j'ai été éduquée par mes sœurs aînées parce que j'étais une fille; j'ai dû faire mon chemin dans la vie, étudier très fort. Quant à mes valeurs religieuses, j'adhérais à celles de ma mère, un mélange de bouddhisme, de taoïsme et de religion populaire. C'est la croyance de la majorité des Chinois de Hong Kong. Elle s'exprime par des prières adressées aux multiples divinités et accompagnées d'offrandes d'aliments, d'argent, de vêtements de papier.

Après mes études primaires, j'ai réussi à m'inscrire à Tak Oi, une école secondaire subventionnée par le gouvernement et dirigée par les Sœurs Missionnaires de l'Immaculée-Conception. L'ambiance de l'école était chaleureuse. Il y régnait un climat de grande liberté  et  un  véritable  esprit  de  famille  empreint d'amour, ce qui m'a beaucoup aidée au cours de mes années d'adolescence. Cette heureuse expérience a fait naître en moi un ardent désir: devenir enseignante pour aider d'autres jeunes dans leur croissance personne/le. Une fois mes études universitaires complétées, j'ai débuté ma carrière comme professeure de biologie, puis pendant onze ans, on m'a confié les cours d'éthique et d'enseignement religieux.

Professeure de religion dans une école catholique? Tu avais prévu ce parcours?

Partons du tout début. La religion de mon enfance mariait bouddhisme, taoïsme et religion populaire. Même si je fréquentais une école catholique, je n'avais nullement l'intention d'adhérer à cette religion. Rien ne m'attirait dans les rites et symboles que j'observais à la messe célébrée en milieu scolaire. Mais l'éducation que j’y recevais éveillait en moi le désir de chercher quelque chose de plus profond.

Dès ma quatrième année secondaire, je me posais beaucoup de questions: D'où est-ce que je viens? Où irai-je après ma mort? Quel est le sens de la vie? Pourquoi la vie comporte-t-elle tant de souffrances? ... Alors je me suis mise à chercher des réponses à toutes ces questions. J'ai fréquenté un peu le protestantisme, puis plus longuement le bouddhisme. L'enseignement de Bouddha au sujet de la vie et de la souffrance me rendait très heureuse, mais je n'obtenais pas de réponse à ma question : D'où est-ce que je viens ?

Alors que je végétais dans le bouddhisme, j'ai saisi l'occasion qu'on m'offrait d'assister à une classe de catéchuménat dans une église catholique. Ainsi les cours me permettraient d'être plus renseignée sur la foi catholique et au bout de deux ans, je n'aurais qu'à décider de recevoir ou non le baptême. Après  un  an  et  demi  de catéchuménat, je n'avais pas trouvé de réponses à toutes mes questions. Cependant, quand on m'a demandé si je voulais recevoir le baptême, j'ai senti qu'au cours de ces deux années de recherche, une douce rivière avait lentement déversé en moi  ses  eaux paisibles;  il  n'y  avait aucune raison de l'arrêter...  Après avoir cherché pendant dix ans, j'ai dit Oui.

Que s’est-il passé alors ?

J'ai été baptisé en 1986 durant la Veillée pascale. Cet événement a complètement changé ma façon de voir ma vie. Je me suis sentie plus positive, plus joyeuse, plus vivante. Cette transformation a été, bien sûr, le fruit de nombreuses rencontres, activités et sessions auxquelles j'ai participé au niveau du diocèse. On peut aussi l'attribuer à la vie de ma communauté paroissiale dans laquelle je m'impliquais.

Peu de temps après, l'épreuve est survenue. J 'ai été confrontée à de véritables défis: la maladie, l'expérience de mes propres limites et les  difficultés  inhérentes  à la  vie. Pourtant ces défis se sont avérés des temps de grâce.  Ils m'ont permis d'accueillir l'amour d'un Dieu qui guérit. Le Seigneur me conduisait  par des vallées sinueuses où j'expérimentais, à l'intérieur de moi, sa présence aimante, une présence forte, intense. Plus il me comblait de son amour, plus je me sentais poussée à partager avec d’autres ce message, cette Bonne Nouvelle du salut : Jésus, le Christ, est notre Sauveur, Il nous apporte espérance, vie et joie.

Cette étape a duré plusieurs années, jusqu'au moment où j'ai demandé au Seigneur: Mon Dieu, tu m'as tellement donné, que puis-je faire de plus pour toi ? Puis, comme ma relation avec Lui s'intensifiait, une autre question a surgi: La vie religieuse ne serait-elle pas un moyen pour mieux vivre ma relation avec Dieu? Une telle décision  n'était pas  facile à prendre, car j'avais  un emploi  stable, une famille, des amis  qui m'aimaient, etc. De plus, je  ne voulais pas devenir religieuse chez les Sœurs Missionnaires de l'Immaculée-Conception uniquement parce  que j'avais  étudié chez elles. Je me suis donc mise à la recherche  d'autres communautés religieuses pour trouver celle où je pourrais vivre ma vie avec Dieu. Cette démarche fut courte, moins de deux ans, car j'ai bientôt compris que, peu importe la quantité d'informations recueillies et le nombre de personnes consultées,  c'était  moi, en  fin  de compte, qui  devais plonger dans l'inconnu.

J'ai  donc demandé mon admission chez les Sœurs Missionnaires de l'Immaculée-Conception. Pourquoi ai-je finalement choisi cette Communauté? Parce que la spiritualité d'Action de Grâces qui l'anime correspond parfaitement à mon vécu de foi. Une parole de notre Mère Fondatrice, Délia Tétreault, l'exprime très bien : Dieu nous a tout donné, même son propre Fils; quoi de mieux pour le payer de retour que de lui donner des enfants, des élus qui à leur tour chanteront éternellement ses bontés.

Ainsi, pour toi, le meilleur moyen de te rapprocher de Dieu et de Le remercier, c’est de participer à la Mission. Comment as-tu accueilli le projet missionnaire que la Communauté te proposait en Afrique?

Je suis entrée dans cette expérience missionnaire avec confiance en Dieu, sachant qu'Il en tirerait du bien ... J'étais heureuse d'apprendre que j'enseignerais la biologie à l'école Marymount de Mzuzu. C'est un sujet fascinant qui ouvre notre regard aux merveilles du Dieu Créateur et puis j'aime beaucoup enseigner, accompagner les jeunes dans leur croissance. Mais je n'étais pas sans crainte. Je m'inquiétais de mon adaptation comme professeure dans une autre culture : les étudiantes vont-elles m'accepter... me comprendre, moi, une étrangère.

Et qu’as-tu vécu au Malawi ?

L'école secondaire Marymount accueille environ 600 élèves. Chaque classe compte 70 à 80 filles. Elles viennent de tous les coins du pays. En plus d'enseigner la biologie en secondaire I et II, j'anime aussi un club missionnaire. Une quinzaine de jeunes en font partie; j'apprends beaucoup à travers leurs partages. Mon travail à Mzuzu répond pleinement à mes aspirations. Je reçois énormément dans cette expérience missionnaire.

À Marymount, les professeurs, tout comme les étudiantes, communiquent spontanément avec les personnes d'autres nationalités et les accueillent cordialement. Leur ouverture  m'impressionne  beaucoup. Les Malawites sont chaleureux, sympathiques, hospitaliers. À leur  contact, je  rencontre  une autre culture débordante de joie  de vivre, avec ses chants, ses  danses ...  Je  fais  aussi l'apprentissage d'une façon différente de considérer le temps, d'une autre philosophie del'efficacité et du développement. Pour les gens du Malawi, ce qui prime, c'est l'accueil de la vie. Prendre  la  vie comme  elle  vient, en  souriant; savoir attendre, recommencer, sans exagérer les difficultés ...Ce qui me touche aussi, c'est leur relation à Dieu : il leur est tout naturel et facile de prier, de Lui parler. Ils se reconnaissent humblement comme ses créatures et ils ont besoin de Lui . . . 

J'ai encore beaucoup à découvrir! J'entre à petits pas dans la vie africaine... Et je réalise à quel point Dieu me prodigue ses dons à travers cette expérience missionnaire. Une expérience si enrichissante que je prends chaque jour le temps de la savourer! En me donnant la possibilité de vivre en Afrique, Dieu me donne accès à une compréhension plus adéquate de moi-même, de ma propre culture et de mes valeurs, ainsi qu'à une meilleure compréhension des autres, de leur culture et de leurs valeurs. J'arrive ainsi à une expérience plus profonde de son Amour et  à une appréciation plus juste des merveilles de sa création.